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Extraits de la chronique "Ainsi va la langue"
de notre revue Le nouveau dévorant

Les soixante-dix ans « d’ordinateur » !

José Claveizolle - N°322 - Septembre 2025

 

Il ne s’agit pas ici d’évoquer la longévité d’un appareil, mais de « commémorer » l’anniversaire de la création du mot. Nous le devons à Jacques Perret, professeur à l’université de la Sorbonne. Voici un extrait de la lettre qu’il adressa à Christian de Waldner de Freundstein, alors président d’IBM France, le 16 avril 1955. Ce document figure dans les archives de la commission ministérielle de terminologie de l’informatique.

« Cher monsieur,

Que diriez-vous d’ordinateur ? C’est un mot correctement formé, qui se trouve même dans le Littré comme adjectif désignant Dieu qui met de l’ordre dans le monde. Un mot de ce genre a l’avantage de donner aisément un verbe, ordiner, un nom d’action, ordination. L’inconvénient est que ordination désigne une cérémonie religieuse ; mais les deux champs de signification (religion et comptabilité) sont si éloignés et la cérémonie d’ordination connue, je crois, de si peu de personnes que l’inconvénient est peut-être mineur. D’ailleurs, votre machine serait ordinateur (et non ordination) et ce mot est tout à fait sorti de l’usage théologique. »

Il réfutait ensuite d’autres termes : « Systémateur serait un néologisme, mais qui ne me parait pas offensant : il permet systémation ; mais systémer ne me semble guère utilisable. Combinateur a l’inconvénient du sens péjoratif de combine ; combiner est usuel, donc peu capable de devenir technique : combination ne me parait guère viable à cause de la proximité de combinaison. Congesteur, digesteur évoquent trop congestion et digestion. Synthétiseur ne me parait pas un mot assez neuf pour désigner un objet spécifique, déterminé comme votre machine. »

Il concluait ainsi : « Je souhaite que ces suggestions stimulent, orientent vos propres facultés d’invention. N’hésitez pas à me donner un coup de téléphone si vous avez une idée qui vous paraisse requérir l’avis d’un philologue. »

 

Dictionnaires

José Claveizolle - N°322 - Septembre 2025

 

Pourquoi se priver d’un petit rappel sur le Dictionnaire de l’Académie française ? L’Académie souhaite que sa neuvième édition soit comprise comme « le miroir d’une époque qui court de 1950 à nos jours ». Parmi les nouveautés : des mots tirés de la langue familière (« rififi », « zonzon », « Saint-Glinglin ») ; de langues étrangères (« risotto », « top-modèle », « sashimi ») ; ou encore du langage scientifique. Ainsi de « radiotoxicité » ou de « xénogreffe ». Le dictionnaire, qui comprend quelque soixante-mille mots, est disponible en ligne gratuitement grâce à un portail d’accès numérique.

 

La prochaine édition du Dictionnaire Larousse, qui fêtera son 119e anniversaire en 2026, recensera 64 500 mots et 125 000 occurrences. Avec ses ajouts au fil de l’eau, il continue son travail essentiel : « capturer l’air du temps » en se faisant le miroir de la réflexion identitaire et sociétale actuelle. Ainsi, voit-on apparaitre des termes comme asexuel, définissant une personne n’éprouvant aucun désir sexuel, ou non-binaire, désignant une identité de genre ne correspondant pas uniquement à homme ou femme.

L’expression « syndrome de l’imposteur » y fait aussi son entrée. Popularisée par son usage dans le milieu professionnel et étudiant, elle décrit ce sentiment de ne jamais se sentir légitime, même face au succès. Autre ajout : inclusif, terme utilisé pour qualifier un langage ou une action prenant en compte toutes les diversités. Le Petit Larousse 2026 illustre aussi l’enrichissement permanent du français par des mots venus d’ailleurs. Le skyr, spécialité laitière islandaise, ou encore le mot japonais ikigai, signifiant « trouver un sens et une satisfaction dans sa vie », illustrent cette ouverture culturelle. Enfin l’édition 2026 accueille aussi des pratiques contemporaines comme l’urbex, l’exploration de lieux abandonnés, et la micromobilité, qui regroupe les transports légers comme les trottinettes électriques.

Les enjeux écologiques sont pris en compte ; plusieurs termes, devenus quasiment « d’usage courant » durant les Jeux olympiques de Paris trouvent, dans cette édition, leur définition (cécifoot, parasport). Certes, plus permissif aux termes anglais, que celui de l’Académie française, ce « classique des dictionnaires » colle à l’actualité, comme ses confrères, mais qui désormais parmi les jeunes usagers de la langue française ouvre encore un dictionnaire ?

 

Conclave

José Claveizolle - N°322 - Septembre 2025

 

On a connu les « Grenelles » (de l’environnement, des violences conjugales, de l’éducation…). On se souvient du « conclave des retraites », l’idée est la même : faire émerger des propositions nouvelles et consensuelles émanant de groupes de travail d’obédiences variées et d’intérêts non convergents. Mais si nos « Grenelles » ont à voir avec l’adresse du ministère du Travail, sis Hôtel du Châtelet, 127 rue de Grenelle à Paris 7e, à quoi se rapporte le mot conclave ? Aux termes latins cum et clave, littéralement « avec clé » désignant une « pièce fermée à clé ».

Pour l’Église catholique, c’est le lieu où l’on enferme les cardinaux jusqu’à ce qu’ils aient choisi le nouveau pape. Le dernier conclave s’est achevé le 8 mai 2025, avec la nomination de Léon XIV, début d’un nouveau pontificat. Ce terme désigne tout à la fois la dignité de pape et la durée d’exercice de la charge.

L’adjectif pontifical définit ce qui est relatif au souverain pontife, mais, également le livre qui contient l’ordre des cérémonies propres aux papes et aux évêques, et dans ce cas, c’est un substantif. Ce mot vient du latin pontifex, issu de pons (le pont) et fex (de facere, faire), au sens littéral « faiseur de ponts ». Si l’étymologie est discutée, l’image n’en est pas moins parlante.

À la fin du conclave, la phrase officielle est prononcée par le protodiacre : Habemus papam, qui veut dire « nous avons un pape ». Protodiacre, lui, vient du grec, et précisément de protos, premier et diachronos, assistant, ou serviteur. Terminons par ce mot étrange, le camerlingue. C’est un titre, surtout honorifique, mais très important quand le Saint-Siège est vacant. Celui qui le porte est chargé d’administrer les affaires courantes du gouvernement pontifical, mais son pouvoir est restreint. Le mot vient de l’italien camerlingo, lui-même issu du germanique kamerling. Son équivalent dans le lexique français est chambellan qui vient de l’italien camera, la Chambre.

 

La publicité en anglais

José Claveizolle - N°322 - Septembre 2025

Source Défense de la langue française (DLF), Pierre Gusdorf

 

Un nouveau sondage confirme l’aversion des Français pour les anglicismes dans les messages publicitaires.

La Délégation générale à la langue française et aux langues de France a publié, le 3 avril dernier, les résultats d’une étude Toluna/Harris Interactive concernant « Les Français et l’emploi de la langue française ». Réalisée en novembre 2024, elle porte sur la perception de la langue française et la présence de mots et expressions issus de langues étrangères comme l’anglais dans l’espace public.

Dans le prolongement d’une étude du Crédoc (Le multilinguisme en France aujourd’hui, opinion, usages, pratiques 2021), ce nouveau sondage confirme que l’utilisation de mots ou expressions en anglais dans un message publicitaire conduit à des réactions majoritairement négatives : l’emploi d’anglicismes « intéresse » ou « plait à » 19 % des sondés ; alors qu’il suscite chez 45 % d’entre eux des réactions de « gêne » voire de « colère ». Ces proportions sont dans le droit-fil de l’enquête du Crédoc selon laquelle 47 % des Français se déclaraient « agacés » ou hostiles » aux messages publicitaires comportant des mots en anglais.

Ce constat est-il de nature à mettre un frein à l’inflation d’anglicismes plus ou moins ridicules ou abscons dans la publicité ? Rien n’est moins sûr. En mars 2023, le Conseil de l’éthique publicitaire, qui a pour mission d’éclairer l’Autorité de régulation professionnelle de la publicité, pointait « le recours devenu très systématique à l’anglais ou au globish ». Il concluait : « le problème est celui de l’appauvrissement de la pensée et celui de l’exclusion pour une partie de la population (…) ». Force est de constater que cette mise en garde n’a guère été suivie d’effet. L’anglais ou plus exactement ce qui « a l’air d’être anglais » est privilégié pour sa valeur supposée de modernité, d’innovation et d’ouverture au monde. Pour les marques, s’exprimer avec des anglicismes illustrerait leur caractère supposément innovant, notamment pour s’adresser aux jeunes. Cette conviction est tellement forte qu’elle ne souffre aucune réflexion et aucun questionnement : elle fonctionne comme une doxa, une croyance absolue.

Les publicitaires et professionnels de la communication gagneraient pourtant à méditer cette phrase de Nelson Mandela : « Si vous parlez à un homme dans une langue qu’il comprend, cela va dans sa tête. Si vous lui parlez dans sa langue, cela va dans son cœur. »

Agir pour la langue

Le CLEC s'est fixé comme objectif permanent de défendre la langue française et la Francophonie.

À ce titre, il suit l’actualité de ce domaine et dénonce les atteintes contre notre langue. Le CLEC, aux côtés des autres associations de défense du français, s’associe à de nombreuses actions de revendication et campagnes de promotion.

Le CLEC rend compte de ces engagements sur cette page du site et dans la chronique Ainsi va la langue de notre revue trimestrielle Le nouveau dévorant.

Communiqué de l'Assemblée générale du CLEC du 28 janvier 2023

Les nouvelles du front sont mauvaises.

Le Français est toujours aussi malmené !

 

Nous avons proposé à l’ensemble des lecteurs de notre revue de juin 2023 de prendre connaissance du texte, rédigé par Julien Köberich, et lu, par lui, avec talent, lors de l’assemblée générale du CLEC, le samedi 28 janvier. L’auteur fait un point aussi détaillé que possible, mais guère plus rassurant pour autant des heurs et malheurs de notre langue.

***

Les nouvelles du front sont mauvaises. Le Français est toujours aussi malmené.

Le Haut Conseil de la Langue Française et de la Francophonie (HCILFF) et ses 34 associations membres ont rappelé au Président de la République sa promesse du 7 mars 2021, réitérée le 15 février 2022, d’utiliser son tour de présidence du Conseil de l’Union, au 1er semestre de 2022, pour mettre fin à l’entourloupe de la Commission européenne, du Parquet européen et de la Cour des Comptes de l’UE, qui, sans demander l’avis de quiconque, avait décidé, à la suite du Brexit, de promouvoir l’anglais « langue commune », c’est à dire, dans les faits, langue unique de travail. Rappelons que l’association Avenir de la Langue Française (Alf) avait déposé plainte, plainte pour laquelle le Parquet s’était déclaré incompétent.

L’attente fut vaine, le Président de la République s’est assis sur sa promesse et n’a pas levé le petit doigt.

 

C’est essentiellement pour cette raison que M. Macron a reçu cette année le prix de la Carpette anglaise, mettant fin à une règle que s’était toujours fixée son académie, de ne jamais s’attaquer, par courtoisie, au président de la République.

 

Cette fois, c’est sûr, la nouvelle carte d’identité française est et restera en bilingue anglo-français. Un recours a été déposé auprès du Conseil d’État, lequel, grâce à une subtile distinction dont les juristes ont le secret, a affirmé que la loi Toubon n’était applicable que pour les inscriptions sur la voie publique et que par conséquent la carte d’identité échappait à cette obligation d’une traduction dans au moins deux langues. Au grand regret des conseillers d’État, on imagine.

Le gouvernement avait quant à lui argüé que traduire dans trois langues prendrait trop de place sur le document et nuirait à la lisibilité.

Cet argument ne semble pas avoir convaincu nombre d’États de l’Union puisque les cartes d’identité allemande, roumaine, autrichienne et lettonne sont en trois langues. Celles suisse et belge en quatre langues. Et, le plus curieux, le plus inadmissible sans doute, celle d’Espagne en une seule : l’espagnol.

Notons à ce propos que les quelques recours dont sont saisis les tribunaux administratifs à propos d’un abus de langue anglaise finissent quasi systématiquement par un échec.

 

Après le Rwanda, le Togo et le très francophone Gabon ont adhéré au Commonwealth.

 

Pour se détendre, voici quelques nouveaux slogans parmi les plus risibles trouvés par nos  anglomaniaques de compétition :  « Ma french bank » de La Poste, « Only Lyon », « l’Aisne it’s open », le « Welcome day » de la ville de Chambéry, le « Miam Street Food Festival » de la mairie de Cluses, « le SNCF connect » de qui on sait.

Même tendance au sommet de l’État puisque le président s’entoure de « helpers » et donne des titres anglais à nombre de politiques publiques comme  « French tech », « Choose France » ; « Next 40 (forty) », « Health Data Hub ».

Concluons par une lueur d’espoir : en juin 2022 à Toulouse une « maison des francophonies » a été ouverte par quelques dizaines de militants amoureux de leur langue et qui comptent la défendre et la promouvoir.

Vous trouverez ci-dessous
quelques-unes des actions, soutiens ou expressions

Catalogue de propositions pour la Cité internationale de la Francophonie – Villers Cotterêts

Ces contributions, préfacées par Catherine Distinguin, présidente de Avenir de la Langue Française, directrice du pôle francophonie du Carrefour des acteurs Sociaux, viennent d’être rassemblées en une plaquette mise en forme par Davide Quaglio Cotti. Cette plaquette, paginée en chiffres romains de I à XVI viendra prendre place en cahier central, dans le numéro de 32 pages de « Vivre l’Histoire Ensemble » en cours de finalisation.

L’objectif de cette action est de porter ces propositions à la connaissance des autorités chargées de concevoir les programmes qui seront développés au sein de la Cité Internationale de la Francophonie. Un premier dossier a été porté par une délégation à la commission des affaires culturelles du Sénat. D’autres délégations sont en cours de constitution.

(Mars 2021)

Prendre

connaissance

du catalogue

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12avril 2022

COMMUNIQUÉ de PRESSE du Haut Conseil international de la Langue française et de la Francophonie (HCILFF)

               

Le Haut Conseil international de la Langue française et de la Francophonie (HCILFF) a organisé le 20 mars 2022, journée mondiale de la Francophonie, un rassemblement des francophones de divers pays sur la place du Panthéon, et une marche en cortège dans le Quartier latin « Pour le français, la Francophonie et le respect de la diversité linguistique de l’Europe ».

Au Président de la République, le Haut Conseil et ses 34 associations membres ont rappelé sa promesse du 7 mars 2021, réitérée le 15 février 2022, transmise par lettres de son gouvernement (S.E. Affaires européennes), d’utiliser son tour de présidence du Conseil de l’Union, au 1er semestre de 2022, pour mettre fin au coup d’État de la Commission européenne, du Parquet européen et de la Cour des Comptes de l’UE. Ces trois institutions de l’Union avaient en effet, dès l’officialisation du Brexit, décidé de leur propre chef de garder l’anglais et même de le promouvoir « langue commune », faisant de lui leur unique langue de travail de fait. Coup d’État, puisqu’une telle décision relevait du seul Conseil des Chefs d’État et de gouvernement de l’Union. Décision illégitime, puisque l’Europe est diversité politique, surtout linguistique et culturelle. Décision illégale, violant les textes de base de l’Union : le traité de Rome de 1957, la Charte des Droits fondamentaux, et le Règlement n° 1 de 1958 sur les langues officielles et de travail. Saisi d’un recours par Avenir de la Langue française (ALF), le Tribunal européen s’est déclaré en aout 2021 incompétent sur le fond.

Le Haut Conseil international attend donc encore du Président de la République exerçant ce semestre la présidence du Conseil de l’Union, qu’il honore sa promesse avant la fin de cette présidence, et l’annonce publiquement avant le 24 avril, date du second tour de l’élection présidentielle.

 

Contact : Avenir de la Langue française (ALF), le Secrétaire général du HCILFF, 34bis, rue de Picpus, 75012 Paris : Albert Salon, ancien ambassadeur, albert.salon0638@orange.fr ; tel 07 68 87 16 01.

Une petite fille

A pris une chenille,

C’était un jeudi

Dans la ville.

Elle s’appelle Camille.

Une histoire farfelue :

Un beau matin

Le sapin

Mine de rien

Rencontre un lapin

Dans mon jardin.

La marche arrière

Ne nous sert guère

À résoudre les guerres

Dans nos âmes amères.

La vente aux enchères

Nous fait payer cher

La perte de nos repères.

Je suis dans la rue

La journée foutue.

Beaucoup de bruit.

Et je m’ennuie.

Courrier d'outre-Rhin

 

Il est fréquent que dans notre revue nous nous désolions du sort qui est fait à la langue française. Il est plus rare que nous nous réjouissions de sa diffusion en Europe.

Notre adhérente, Gundula Engstern, Berlinoise et enseignante bénévole du français nous en donne l’occasion. Elle dispense des cours de français à des adultes (Volkshochschule, c.-à-d. : école pour le peuple) à Königs-Wusterhausen et à Postdam.

Les séances se déroulent dans des lieux mis à disposition en fonction de leur disponibilité ; ainsi, parfois les enseignements sont donnés sur une période de quelques jours, par exemple dans une école désertée par les élèves durant les vacances scolaires.

Gundula, au cours d’une de ces séances, fit travailler ses stagiaires sur la rime. Sachant qu’ils auront l’occasion de parcourir notre revue, le CLEC a adressé à nos amis allemands un amical salut. Nous publions quelques-uns des petits textes qui nous ont été transmis, comme nous le faisons des contributions de nos ateliers parisiens.

Le CLEC applique dans toutes ses publications les règles de l'orthographe recommandée par l'Académie française

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